Des couteaux dans les poules

Le Théâtre a ceci de passionnant qu’il reflète avec force les personnalités sur, devant et derrière la scène.

Le spectateur peut juger de l’émotion qu’une pièce génère en fonction du jeu des comédiens. S’identifie-t-il aux personnages ? Entre-t-il en compassion avec ceux-ci ? Assis confortablement (pas toujours) sur son siège, il pense maitriser l’information de l’oeuvre qui se joue devant ses yeux critiques.

Ainsi, lorsqu’il rend son jugement, c’est avec plus ou moins d’humilité qu’il tentera de décrire ce qu’il a compris, ce qu’il a aimé et, éventuellement, ce qu’il aurait fait différemment. Se faisant, réalise-t-il qu’il délivre en fait la copie de son propre personnage (comprenez aussi personnalité). Le spectateur.

La vérité est que ce dernier est aveugle à l’essentiel de ce qui se passe sur scène. Remarque-t-il le stress provoqué par un changement de décor ou de costume de dernière minute ? Ressent-il l’adaptation, en temps réel, d’un régisseur lumière fraichement débarqué pour palier l’absence du titulaire ? Perçoit-il la joie d’une réplique bien maitrisée ou la mine défaite d’un passage oublié ?

En marge du jeu, il y a les vraies émotions. Celles vécues par les parties prenantes du projet. L’espoir et les attentes faces au fatalisme et au manque de confiance.

La mise en scène se construit de décisions qui font et défont une pièce.

De quelle manière l’équipe gère-t-elle cet espace-temps où le chaos doit être accepté et bienvenu tout en étant maitrisé ? Ce processus, qui prend fin avec la Première, délivre un concentré de caractères et de personnalités fondus au sein d’une troupe qui oeuvre pour une interprétation plus ou moins précise d’un texte.

Dommage que le public n’y assiste pas car c’est surtout ça le Théâtre…

“Des couteux dans les poules” de David Harrower

Mise en scène Kathinka Salzmann

28 octobre au 8 novembre 2014

Maison de quartier des Pâquis, La Traverse

Rue de Berne 50, 1201 Genève

Video: J. Saugy

Texte: J. Saugy

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